14/06/2021
Rencontre avec Agnès Conod, artisan d’Art spécialisée dans les enduits naturels décoratifs depuis 25 ans.
BARNES Lyon est parti à la rencontre d’Agnès Conod, artisan d’Art spécialisée dans les enduits naturels décoratifs depuis 25 ans. C’est au cœur de la Croix-Rousse, au sein de son atelier, qu’elle nous a accueilli pour échanger au sujet de l’essence même de son travail. Une rencontre aussi instinctive qu’instructive.
Quels sont les piliers de votre métier et d’où vous vient cette passion?
Je propose à mes clients des décorations murales créées à partir de matériaux naturels et simples comme du sable, de l’eau et de la chaux. L’idée première est de mélanger ces matériaux, de fabriquer mes propres couleurs afin de proposer des éléments de décoration sur-mesure uniques à mes clients.
La particularité de mon travail est de n’utiliser que de la chaux, du sable et de l’eau avec quelques variations, notamment des pigments de couleurs qui viennent du monde entier. Mon rôle est de leur proposer des alternatives à la plâtrerie/peinture et à la tapisserie.
Pourquoi avoir choisi la Croix-Rousse pour installer votre atelier ?
Je suis à la Croix-Rousse depuis plus de 20 ans. J’ai la chance de beaucoup bouger et voyager avec mon métier, mais j’ai gardé une attache toute particulière à la Croix-Rousse car c’est l’endroit où je suis née. Je ne m’en suis jamais lassée. J’aime ce quartier, où sont ancrées mes racines, et je ne me vois pas le quitter.
Quel a été votre parcours pour arriver jusqu’ici ?
Mon parcours remonte à loin étant donné que j’ai déjà 51 ans (rires). De manière générale, j’ai toujours aimé dessiner et j’ai toujours été attirée par les arts plastiques. Après un Bac général qui ne m’a pas spécialement plu, je suis entrée en École d’Arts Appliqués. J’ai ensuite intégré les Beaux Arts avant de suivre un CAP spécialisé en plâtrerie/peinture option décor. Finalement, mon parcours s’est terminé par une formation en maçonnerie traditionnelle.
Je suis donc passée de formations d’études supérieures à des études beaucoup plus concrètes et spécialisées. C’est ce qui m'a permis de trouver cet équilibre aujourd’hui.
Quelles sont les compétences indispensables à la réalisation de votre métier?
Il faut être souple, car on ne décide pas de tout dans ce métier. C’est une vraie leçon de vie. Il faut également aimer la vie nomade, voire un peu roots (rires) dans le sens où on a sans cesse les mains dans la matière, tout en voyageant beaucoup entre différents chantiers. Il faut également être sportif.
Finalement, on peut dire que ce métier s'apparente à la randonnée. Tu prépares ton itinéraire, tu pars, puis il y a un orage et il faut changer de plan. On a toujours à s’adapter.
Ce métier demande également beaucoup de préparation.
C’est un peu comme un comédien ou un improvisateur qui va se préparer avant son spectacle. Il y a beaucoup de petits tests à réaliser pour s’assurer que tout fonctionne. Et une fois qu’on se lance, c’est à l’inverse très spontané et brut. Il n’y a pas de retour en arrière possible, car le temps est limité pour travailler.
Pour qui réalisez-vous ces œuvres ?
Pour des professionnels (principalement des architectes) et des particuliers. Ce que je préfère, c’est l’échange qui s’opère en amont de la réalisation. Ces échanges sont source de nombreuses idées et décuplent ma créativité. On vit une véritable aventure avec eux. On réfléchit ensemble à leur projet, je me nourris de leur environnement, de leur personnalité, de leurs envies. C’est un travail sur-mesure, il y a donc plusieurs étapes de création qui se succèdent et se nourrissent; c’est la facette de mon travail que je préfère.
J’aime quand le projet prend naissance. J’adore échanger avec mes clients et j’aime voir que mon métier les fait rêver et leur apporte du bien. C’est un vrai moteur pour moi.
J’aime aussi les tests en atelier, seule, sans pression, là où toutes mes idées vont prendre vie.
Il y a bien sûr des aspects que j’aime moins comme le fait de porter des charges lourdes. Même si je suis issue d’une famille de sportifs, ça reste très difficile au quotidien. La chaux a également tendance à irriter les mains et les voies respiratoires.
Est-ce que vous avez une journée type ?
Pas vraiment. Je change de lieu tous les 15 jours, je passe d’endroits intimistes et silencieux à des lieux plus bruyants propices aux échanges. D’où le fait de devoir être souple dans ce métier. Aucune journée ne se ressemble. On se renouvelle sans cesse, car les matériaux que j’utilise offrent des possibilités infinies.
Qu'est-ce qui surprend le plus vos clients dans votre métier ?
Souvent, lorsque les clients visitent l’atelier, ils sont surpris par la “face cachée de l’iceberg”. Ils ne se rendent pas compte que c’est un travail très physique qui demande de la force et beaucoup de temps en amont.
Quelles sont vos sources d'inspiration ?
La première et je pense la principale, c’est le rapport à la montagne. J’ai un père alpiniste et j’ai grandi dans cet environnement. Enfant, j’ai toujours été en contact avec la roche et la terre. C’est ce qui a construit mon rapport à la matière aujourd'hui.
De manière générale, le monde de l'art m’inspire également beaucoup. J’ai pratiqué d’autres arts comme le théâtre, la danse contemporaine ou encore la musique qui m’inspirent beaucoup au quotidien. Cette inspiration est inépuisable avec tout ce qui nous entoure.
Pour moi, sans art il n’y a pas de vie. J’aime tous les arts, ça fait partie de moi. Je ne me définis pas comme artiste. Un artiste va travailler sans avoir besoin d’un support. J’ai un propos artistique dans mon travail mais je m’adapte sans cesse à la demande. J'ai besoin d’être inspiré par l’espace et les personnes pour réaliser un travail sur mesure. Il y a de la créativité et une démarche artistique mais je reste artisan. Je veux faire les choses pour mes clients, pour rendre leur « monde beau ». C'est d'ailleurs de là que vient le nom de mon atelier « Le monde est beau ».
Rencontrez Agnès dans son atelier au cœur de la Croix-Rousse :
Le Monde est Beau
4, place Bertone